Béhaalotékha 5785 – n°457

Dans notre paracha, la Torah raconte comment il fallait préparer les Lévi au service divin : « ”וכה תעשה להם לטהרם הזה עליהם מי חטאת והעבירו תער על כל בשרם – Ainsi tu feras pour eux afin de les purifier : tu aspergeras sur eux l’eau d’expiation, et ils feront passer le rasoir sur toute leur chair ».

On peut s’étonner : pourquoi Hakadosh Baroukh Hou a-t-Il ordonné que les Léviim soient rasés intégralement au moment même où Il les choisissait pour Le servir parmi tout Israël ? Un tel rasage intégral n’était pratiqué que pour les metsoraïm (lépreux), comme signe de honte et d’exclusion. Pourquoi, donc, ordonner une forme de déshonneur à ceux qui allaient devenir les serviteurs d’Hashem ?

Rachi, au nom de Rabbi Moshé ha-Darshan, répond ainsi : « Parce que les Léviim venaient en remplacement des premiers-nés, qui avaient fauté en servant l’idolâtrie lors du veau d’or. Or l’idolâtrie est qualifiée dans la Torah de zivḥei metim – “sacrifices aux morts” – et le metsora est lui aussi appelé “mort”. C’est pourquoi les Léviim durent subir un rasage complet, comme les metsoraïm ».

Notre maître Rav Moshé Shternboukh propose une autre explication. Les Léviim, à la différence du reste d’Israël, ne reçurent aucune part dans la terre d’Israël et ne possédaient donc aucun moyen de subsistance indépendant, comme il est écrit « Les Cohanim, les Léviim n’auront ni part ni héritage avec Israël […] Hashem est leur héritage ».
Toute leur subsistance provenait des dons donnés par le peuple : troumot, ma‘assrot, ‘hallah, bikourim… ainsi que certaines parties de la viande sacrifiée – zéroa‘ (l’épaule), leḥayayim (les joues) et kéva (l’estomac) – ou encore des vêtements issus de réshit haguez (la première tonte).

Par nature, ce statut les plaçait dans une position jugée parfois dévalorisée : ils semblaient vivre aux crochets des autres. Certains les regardaient comme des mendiants ou comme des gens refusant de travailler pour vivre à la charge de la collectivité.

C’est pour cela qu’Hakadosh Baroukh Hou leur ordonna ce rasage radical préalable à leur entrée en fonction, pour les préparer à leur mission. Le message était clair : vous n’avez pas à vous laisser affecter par le regard de l’extérieur. Vous devez être prêts, dès à présent, à être méprisés, humiliés même comme des metsoraïm, pour le mérite suprême d’être les serviteurs d’Hashem. Ce rasage faisait donc partie intégrante de leur ‘hinoukh, de leur formation spirituelle : leur mission exigeait une force intérieure, une indifférence totale à l’opinion du monde, et une conscience claire de l’immense récompense qui leur est réservée dans le monde à venir, puisqu’Hashem est leur héritage.

De là découle un enseignement immense pour les Bné Torah de notre génération, qui sont la tribu de Levi de chaque époque, comme l’écrit le Rambam. Il ne faut jamais se laisser impressionner par les critiques des personnes éloignées de la Torah qui raillent les saintes yéchivot et les avrekhim des kollelim sous prétexte qu’ils vivent aux frais des autres. Ils ne doivent pas tenir compte des moqueries, ni des accusations de paresse ou d’égoïsme. Au contraire, ils doivent se rappeler l’énorme récompense qui les attend, et comprendre que leur mission est de ne pas se laisser influencer par l’environnement social. S’ils doivent être comme des metsoraïm, mis à l’écart de la société, qu’il en soit ainsi – l’essentiel est de rester attachés à Hashem et à Sa Torah.

Et en vérité, les Bné Torah ne vivent pas aux crochets des autres. Bien au contraire : c’est l’ensemble du peuple juif qui se nourrit de leur mérite. Car toute l’abondance qui descend dans le monde vient en vertu de ceux qui s’adonnent à l’étude de la Torah.

Laisser un commentaire