
Nous entrons aujourd’hui dans les shloshet yemei hagbala, les trois jours de séparation qui précédèrent le Don de la Torah. Moshé Rabbénou, sur ordre d’Hakadosh Baroukh Hou, institua ces jours comme un temps de préparation, de purification et d’élévation pour le Klal Yisrael. Ce n’est pas un simple souvenir historique : la Torah n’est pas un héritage figé mais une transmission vivante et perpétuelle. À chaque fête de Shavouot, nous avons l’opportunité — et la responsabilité — de recevoir à nouveau la Torah, comme si elle était donnée aujourd’hui.
La Torah ne descend dans le monde que si nous nous rendons dignes de l’accueillir. Les jours qui précèdent le don de la Torah sont donc bien plus qu’un prélude : ils sont un miroir de notre état spirituel. C’est pourquoi, en plus des sept semaines de Séfirat HaOmer destinées à raffiner nos midot et notre comportement, ces trois jours viennent sanctifier l’approche elle-même — l’attitude intérieure avec laquelle nous nous approchons du Sinaï. Le ḥinoukh, le yirat shamayim, l’engagement profond dans la Torah et pour la Torah ne peuvent s’ancrer durablement que s’ils sont précédés d’un travail de préparation du cœur et de la pensée.
Recevoir la Torah signifie nous réaccorder à la volonté divine, réajuster notre vision du monde, replacer la Torah comme le centre de gravité de notre existence. Que ces jours soient pour nous un moment de redressement intérieur, afin que nous puissions recevoir la Torah cette année avec une profondeur et une vitalité renouvelées.
Le Midrash enseigne que le Har Sinaï fleurit lors du Don de la Thora. Il faut s’interroger : pourquoi était-il nécessaire de réaliser un miracle spécifique pour faire pousser des arbres et des fleurs sur le Har Sinaï ? Que les tonnerres et les éclairs aient accompagné le don de la Torah, on peut le comprendre — cela nous enseigne la manière dont la Torah doit être étudiée, avec crainte et révérence — mais des fleurs ? À quoi servaient-elles ?
On entrevoit ici une compréhension particulièrement parlante. Hakadosh Baroukh Hou a voulu nous enseigner quelle est la puissance de la Torah. Elle a le pouvoir de transformer un homme « sec » — comparable à la terre aride du désert, desséchée, sans la moindre capacité à produire quoi que ce soit — en un homme totalement différent, un homme qui s’épanouit, fleurit et rayonne de joie dans l’étude de la Torah sainte.
Et pour nous transmettre cette leçon, il fallait un miracle visible. Car une fois que l’on comprend ce que peut accomplir la Torah, on adopte envers elle une attitude à la hauteur de sa grandeur. De là, on apprend qu’il ne faut jamais désespérer de quiconque au sein du peuple juif. Même un Juif « sec », éloigné, au visage éteint, sans trace de joie apparente — la Torah a le pouvoir de faire refleurir les déserts, de transformer ces êtres en des hommes totalement renouvelés.
Et même une personne qui « fleurit » déjà, si une part de lui reste sèche, endormie, ou ne s’épanouit pas vraiment — la Torah a la force de revivifier et de faire fleurir encore cette partie-là. Cela dépend de notre engagement : si nous recevons sur nous d’étudier la Torah cette année avec plus de force, plus d’enthousiasme, et avec la conscience qu’elle a le pouvoir de nous transformer en des personnes de niveau spirituel supérieur, alors ce changement pourra réellement se produire.