Pin’has 5785 – n°461

Rav Yossef Haim Zonenfeld

La paracha Pin’has s’ouvre sur la fin dramatique de l’épisode où Zimri, un prince d’Israël, transgressa publiquement la Thora en prenant une femme goya. Pin’has intervient alors avec une réaction radicale et l’élimina.

Cet épisode soulève une question troublante : comment Zimri, un dirigeant du peuple d’Israël, a-t-il pu tomber aussi bas et commettre un acte aussi choquant, en s’unissant publiquement avec une femme non juive — un acte que même les fauteurs ordinaires ne font pas en public ?

Notre maître le Rav Yossef ‘Haïm Zonenfeld apporte une lecture saisissante. Selon lui, Zimri n’a pas agi par pure dépravation, mais par idéologie. Il pensait sincèrement, bien que de façon erronée, calmer la colère divine qui s’était enflammée contre Israël. Les filles de Moav avaient en effet entraîné le peuple dans deux péchés : l’idolâtrie et la débauche. Zimri voulait — dans son esprit tordu — limiter les dégâts. Il se disait que si les Bné Israël transgressaient uniquement la débauche, mais refusaient l’idolâtrie, ce serait “moins grave”. C’est pourquoi il s’afficha publiquement avec Kozbi, une princesse midianite , pour montrer qu’il était possible d’être avec elle sans se prosterner à l’idole Péor.

C’est dans cette optique qu’il agit « devant tout Israël » : pour que tout le monde le voie et suive son exemple, pensant naïvement qu’il empêcherait ainsi la chute dans l’idolâtrie.

C’est ce que souligne le Rav Yossef ‘Haïm Zonenfeld quand il commente les mots de nos Sages :
« Ils commettent l’acte de Zimri et demandent le salaire de Pin’has » — autrement dit, Zimri lui-même pensait agir en “kannaï“, en zélé de D.ieu. Il pensait mériter un salaire pour sa lutte contre l’idolâtrie, bien qu’il ait publiquement fauté. Mais la vérité est tout autre : son acte, loin d’apaiser la colère divine, l’a attisée jusqu’à mettre tout Israël en danger. On n’a pas le droit de retrancher des morceaux de la Torah pour mieux en préserver d’autres. Zimri a donc été jugé comme un fauteur, et non comme un zélé agissant pour la gloire d’Hashem.

De là, une leçon puissante pour notre époque. Certains courants cherchent à abandonner certains aspects de la Torah pour en “sauvegarder” d’autres. Notre maître le Rav de Brisk disait au moment du débat sur le service militaire des filles : même si la loi nous offrait d’exempter les filles religieuses du service militaire, il était interdit d’approuver la conscription des filles non religieuses. Car d’un point de vue de la halakha, ce service est strictement interdit, même pour les laïques.

Il citait alors le Ramban sur le verset : « …le D.ieu Grand, Puissant et Redoutable, qui ne fait pas de favoritisme et n’accepte pas de pots-de-vin… ». Pourquoi évoquer ici le concept de pot-de-vin dans le contexte divin ? C’est évident qu’Hashem est incorruptible !!! Le Ramban explique qu’il s’agit d’un “pot-de-vin spirituel” : même si une personne a accompli beaucoup de mitsvot ou étudié énormément, Hakadosh Baroukh Hou ne “passe pas l’éponge” sur ses fautes grâce à ses mérites.

Le Rav de Brisk en déduisait une règle : on ne peut pas “compenser” une concession dans un domaine de la Torah par un bénéfice ailleurs. Laisser passer une interdiction (comme l’enrôlement des filles non religieuses) en espérant un gain pour d’autres (comme protéger les filles religieuses), c’est un raisonnement faux. On ne doit pas choisir le moins pire ! Hakadosh Baroukh Hou n’accepte pas ce type de “deal” : Il attend de nous fidélité absolue à Sa Torah, dans son intégralité.

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