
La paracha de cette semaine commence par ces mots :
« Vous êtes tous debout aujourd’hui devant Hashem, votre D.ieu : vos chefs de tribus, vos anciens, vos officiers, tous les hommes d’Israël… ».
Notre maître Rachi commente : « Pourquoi cette paracha de Atem nitsavim (“vous êtes debout”) est-elle placée juste après les malédictions ? Parce que, lorsque les Bné Israël entendirent les 98 malédictions qui sont écrites ici, en plus des 49 déjà mentionnées dans Vayikra, leurs visages pâlirent et ils dirent : “Qui peut résister à tout cela ?” Moshé commença alors à les apaiser en disant : “Vous êtes encore debout aujourd’hui devant Hashem ! Vous L’avez beaucoup irrité, et pourtant Il ne vous a pas détruits. Vous êtes toujours là devant Lui.” »
À première vue, cette explication est difficile à comprendre. Car tout l’objectif des malédictions (klalot) est de susciter la crainte de fauter, en faisant comprendre la gravité des punitions prévues pour celui qui transgresse la parole divine. Comment alors Moshé peut-il venir leur dire : « Vous avez irrité Hashem à maintes reprises et pourtant Il ne vous a pas détruits » ? Cela ne risque-t-il pas de réduire leur crainte des sanctions divines ?
Rabbi Eliyahou Lopian explique que les souffrances et les punitions qu’Hashem envoie dans ce monde ne sont pas une vengeance, mais un moyen d’amener l’homme à la crainte du péché et à la téchouva. Leur but est de réveiller le cœur et d’inculquer la yirat shamayim. C’est cela que Moshé dit ici : puisque les malédictions ont déjà produit leur effet — les Bné Israël ont pâli de peur et ressenti la crainte du Ciel — la finalité est atteinte. Ils sont désormais prêts à entrer dans l’alliance avec Hashem et à s’engager à ne plus fauter. Dès lors, il n’est plus nécessaire que les malédictions s’accomplissent concrètement.
Quand Moshé leur rappelle : « Vous L’avez déjà beaucoup irrité et pourtant Il ne vous a pas détruits », il ne veut pas dire qu’Hashem ne punit pas les fautes. Il leur montre que s’ils existent encore, malgré toutes les fautes passées (comme lors de Kora’h, des plaintes, ou des explorateurs qui entraînèrent la mort de toute une génération), c’est précisément parce qu’ils avaient su revenir vers Hashem et tirer la leçon des sanctions qu’ils avaient vues. Ainsi, maintenant qu’ils ressentent une telle crainte qu’ils en pâlissent, ils peuvent être confiants qu’ils ont atteint le but : faire téchouva, et mériter d’échapper aux malédictions.
C’est dans ce sens qu’il faut comprendre l’enseignement des Tossafot dans Méguila : on lit toujours la paracha Nitsavim le Shabbat avant Roch Hachana, et jamais on ne laisse la paracha Ki Tavo (celle des malédictions) juxtaposer directement Roch Hachana. Pourquoi ? Parce que Ki Tavo n’enseigne que les malédictions, sans montrer le chemin pour s’en préserver. Alors que Nitsavim, au contraire, nous apprend que la solution se trouve dans la téchouva, dans l’entrée renouvelée dans l’alliance avec Hashem.
Ainsi, à chaque année, quand nous lisons Nitsavim avant Roch Hachana, nous recevons ce message : les malédictions ne sont pas une fatalité. Le chemin pour s’en protéger existe : revenir vers Hashem, renouveler notre alliance avec Lui. Et c’est cela qui nous permet d’entrer dans le jour du jugement non pas avec effroi, mais avec la joie de savoir que nous avons toujours la possibilité de faire téchouva et d’être inscrits dans le livre de la vie.